L'évolution d'une carrière topographique
J’ai réussi le concours des ingénieurs des travaux géographiques de l’Etat (ITGE) en 1956. J’entrais de plein pied à l’Institut Géographique National (IGN), par le biais de l’Ecole Nationale des Sciences Géographiques (ENSG) qui formait les techniciens et ingénieurs de cet organisme. A l’époque, le cycle d’études durait deux ans, entrecoupé par deux sessions de quatre mois de travaux de terrain dans les Alpes-de-Haute-Provence et le Vaucluse. Ce furent deux années exceptionnelles, en compagnie de sept autres élèves. Quand le matin à six heures, nous partions pour nos travaux de terrain dans ce Haut Pays chanté par Giono, je sus que j’avais choisi le métier qui me correspondait parfaitement. J’ai fait partie de la minorité chanceuse qui a réellement aimé son métier, au point de ne pas couper avec lui au moment de la retraite.
Après le service militaire, l’IGN me permit de travailler dans de nombreux départements français. Je pus aussi travailler dans plusieurs pays d’Afrique : Algérie, Maroc, Mauritanie, mali, Niger, Libye, Egypte, dans des conditions souvent extrêmes correspondant à ma soif d’aventure, en particulier dans le désert.
Arrivé à la quarantaine, les missions à l’étranger devenaient plus rares et je risquais d’être affecté à des fonctions administratives qui ne me convenaient guère, aussi je quittais l’IGN pour m’établir comme free lance. Mais en 1984, un brutal changement des conditions économiques me contraignit à abandonner cette voie. Je trouvais un poste d’enseignant dans un lycée technique qui avait une filière topographie. Mais ce n’était pas ma tasse de thé et à 52 ans, je passais le diplôme de Géomètre-expert foncier qui seul me permettait à l’époque de pratiquer la topographie en France.
C’était une toute autre voie qui s’ouvrait à moi, avec la gestion d’un cabinet et de ses salariés, totalement différente et beaucoup plus contraignante et stressante que le fait de travailler seul. De plus, le coté foncier ne correspondait pas à mon tempérament. J’entrais dans le monde impitoyable des affaires et dans le monde mesquin des rapports avec les propriétaires dont seule une minorité conserve bonne foi et ouverture d'esprit dès qu'il est question de "son bien". J’en ai gardé un coté misanthrope ! Heureusement, me restaient de nombreux travaux purement topographiques ou techniques qui me permettaient d'étancher ma soif de terrain et retrouver le coté plaisant de mon travail.
Il faut ajouter, que comme dans de nombreuses activités humaines, l’électronique et l’informatique ont révolutionné la pratique de mon métier. Quand j’ai commencé à le pratiquer, il avait très peu évolué depuis deux siècles, seulement des évolutions de détail. Dans les années 1960, il fallait encore noter toutes ses observations au crayon, sur un carnet et tout le dessin se faisait à la main. Tout le monde n’a pas su s’adapter à une révolution dont les changements prennent un rythme exponentiel. Je suis constamment admiratif devant de nombreuses percées technologiques qui laissent les jeunes « froids ». J’ai essayé de traduire cette évolution par plusieurs articles que personne n’avait tenté de rédiger.
Bonne lecture des articles joints qui vous intéresseront. Ceux marqués XYZ avec un chiffre se rapportent au numéro de la revue XYZ de l'Association Française de Topographie (AFT), où ils ont paru.